Vous avez aimé le sour, ce mystérieux et malfaisant animal évoqué dans un précédent post de Carmen Galli ? Alors vous adorerez l’allghoi khorkhoi, ou « vers tueur du désert de Gobi », qui rappelle en plus maléfique le sour occidental… Il est redouté des Mongols au point que même sa simple évocation porterait malheur !
Un dangereux cryptide hantant le Désert du Gobi
L’Allghoikhorkhoi, d’après le peintre belge Pieter Dirk
D’après Wikipédia, l’Allghoi khorkhoi (article Olgoï-Khorkhoï) ou « ver-intestin » serait un cryptide (à savoir : « un animal dont l’existence n’est étayée par aucune preuve matérielle » – sic), censé vivre en Mongolie dans le fameux désert de Gobi. Comme le relève l’encyclopédie online, il n’existe, certes, aucune preuve matérielle indiscutée de l’authenticité de ce supposé animal, mais la cryptozoologie lui attribue un certain nombre de caractéristiques bien précises déduites de nombreux récits.
Une créature malfaisante et dangereuse
L’Allghoi khorkhoi mesurerait entre 60 cm et 90 cm de long pour un diamètre d’environ 20 cm ; sa tête et sa queue seraient indistinctes : on ne pourrait donc voir ni ses yeux, ni sa bouche, ni ses narines (à supposer qu’il respire). Autre élément caractéristique, l’animal serait de couleur rouge sang.
Selon différents témoignages, il serait attiré par la couleur jaune et ne sortirait qu’au début de l’été, ou lorsque le sol est humide. Il évoluerait en rampant ou en glissant un peu comme un serpent.
Les Mongols prêtent à l’Allghoi khorkhoi un caractère agressif et dangereux. Selon eux, il est capable de tuer en projetant à distance un poison mortel (qu’il se secréterait lui-même, ou qu’il produirait par ingestion de plantes toxiques), mais d’autres disent qu’il tue par décharge électrique, la mort étant dans tous les cas quasi-instantanée.
Plusieurs expéditions, jusqu’à présent infructueuses
En Europe, l’Allghoi khorkhoi a été signalé pour la première fois en 1926 par un explorateur et aventurier américain, Roy Chapman Andrews, dans son livre On the Trail of Ancient Man. L’auteur, qui souhaitait monter une expédition en Mongolie et avait fait miroiter au Gouvernement mongol la possibilité de capturer un exemplaire du mystérieux ver (désigné dans l’ouvrage sous le nom de « altergorhai-horhai », reste toutefois réservé sur son existence réelle :
« Le premier ministre m’a demandé si c’était possible que je capture pour le gouvernement mongol un spécimen de l’altergorhai-horhai. Je doute que l’un de mes lecteurs scientifiques puisse identifier cet animal, mais j’ai répondu que oui, parce que j’en avais souvent entendu parler. Aucune des personnes présentes n’avait jamais vu la créature, mais tous croyaient fermement en son existence et la décrivaient minutieusement. Il a la forme d’une saucisse d’environ deux pieds de long, n’a ni tête ni jambes et il est tellement toxique que le simple fait de le toucher signifie une mort instantanée. Il vit dans les zones les plus désolées du désert de Gobi […] Le premier ministre déclara que, même s’il ne l’avait jamais vu lui-même, il connaissait un homme qui l’avait vu et qui avait survécu pour raconter l’histoire. Un membre du Cabinet déclara que ” le cousin de la sœur de sa défunte épouse ” l’avait également vu. J’ai promis de ramener l’altergorhai-horhai si nous devions par hasard croisé son chemin, expliquant comment l’attraper au moyen de longues pinces en acier ; de plus, je porterais des lunettes noires afin de neutraliser les effets désastreux rien que de voir une créature si toxique. La réunion s’est terminée avec optimisme; car nous avions un intérêt commun à capturer l’altergorhai-horhai : maintenant les portes de la Mongolie extérieure étaient ouvertes à mon expédition … ».
Bien plus récemment, un aventurier tchèque passionné de cryptozoologie, Ivan Mackerle, s’est lui-aussi lancé à la recherche de l’Allghoi khorkhoi, avec beaucoup plus de moyens mais sans plus de succès que ses devanciers. On trouve la biographie et le récit des expéditions de Mackerle sur nombre de sites spécialisés, ce qui dispensera d’en redonner le détail (cf. par exemple l’article obituaire publié en 2013 par le site Cryptozoonews après la mort de Mackerle).
En fait, Mackerle avait entendu parler du ver quand il était jeune, dans un récit romancé d’un paléontologue russe, Yvan Yefremov. Il avait d’abord pensé que c’était de la pure science-fiction mais il changea d’avis à l’université, quand un de ses compagnons, un étudiant mongol, lui dit connaître la créature avant de lui en faire l’étrange description.
Dans les années 1990-2000, après la fameuse Révolution de velours et la plus grande ouverture des anciens satellites de l’ex URSS, Mackerle put ainsi effectuer trois expéditions en Mongolie et parcourir le Gobi de long en large, par voie terrestre ou avec un ULM.
S’il n’a pas trouvé le mystérieux vers, il a revanche réuni un grand nombre de récits et de rumeurs colportés par des bergers nomades, consignés à son retour dans différents articles. Ainsi, lors d’une de ses expéditions, un de ses guides mongols lui affirma avoir personnellement connu un jeune homme qui avait été tué par le ver…
Quelques pistes de réflexion zoologique
De toute evidence, l’Allghoi khorkhoi n’est ni un poisson (c’est une créature terrestre), ni un oiseau, ni un mammifère. D’autres indices écartent aussi l’hypothèse qu’il puisse s’agir d’un reptile apode (serpent ou orvet), ni même d’un amphibien (à la différence du sour, en lequel beaucoup ne voient –sans doute à tort- qu’une espèce de salamandre) : sa conformation générale, l’indifférenciation entre sa bouche et son anus, le fait qu’il soit clairement identifié par les Mongols comme un ver, etc… Surtout, un récit rapporte qu’on peut tuer un Allghoi khorkhoi en lui assénant sur le corps un violent coup de gourdin, ce qui le fait éclater comme une baudruche répandant un magma graisseux qui se résorbe dans le sable en y laissant une tache sombre. Ni ossements, ni résidus tégumentaires : c’est la preuve qu’il ne s’agit pas d’un vertébré, ni de tout autre invertébré doté de carapace (un insecte ou un mille-pattes) ou de coquille (genre escargot).
Sauf à admettre qu’il s’agirait de la monstrueuse larve (type chenille) d’un insecte géant lui-même non identifié, l’Allghoi khorkhoi appartiendrait alors nécessairement aux invertébrés terrestres (mollusque genre limace géante, annelidé terrestre géant…), dont il serait du reste le plus grand spécimen connu. Il pourrait, par exemple, s’apparenter à cette répugnante sangsue sylvestre géante, découverte il y a relativement peu à Bornéo (en anglais, la « Red Giant Leech », dont la taille peut dépasser 50 cm).
Mais à vrai dire, du strict point de vue zoologique, aucune de ces hypothèses n’emporte la conviction : en définitive, l’Allghoi khorkhoi n’a guère d’homologue terrestre.
En revanche, il pourrait vaguement rappeler certains invertébrés marins, comme Eunice aphroditois (« Bobbit worm » en anglais), cet impressionnant ver aquatique venimeux de couleur brun-rouge, dont la longueur peut atteindre jusqu’à 3 mètres, et dont le mode d’attaque, par irruption soudaine du sol quand sa proie passe au dessus, évoque celui de son lointain cousin mongol…
Mais la comparaison, purement formelle, s’arrête là, et avec elle, toute référence zoologique pertinente.
Une entité astrale bien caractérisée
Si la preuve scientifique de l’existence matérielle de l’étrange créature reste donc à rapporter, sa réalité cryptozoologique ne fait pas le moindre doute : l’Allghoi khorkhoi est non seulement partie intégrante des représentations mentales des éleveurs nomades de cette partie désertique de l’Asie centrale, mais surtout, il se rattache à un vaste tronc commun de cryptides assez similaires, nourri de traditions et de légendes populaires très anciennes et dont les auteurs de science-fiction ont décliné plusieurs variations récentes fort révélatrices.
Affaire à suivre…
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